A PROPOS D'UNE IDÉE IGNOBLE APPELÉE « COMPÉTITION »
http://cnt-ait.info/article.php3?id_article=1435Nous sommes tous suffisamment bien placés pour le savoir :
tout mômes déjà, nos parents nous emmenaient aux portes
d'une institution qui allait nous « prendre en charge ». Dès
l'âge de trois ans, il était manifeste, pour certains
d'entre nous, que cette première forme de « socialisation
forcée » (appelez cela comme il vous plaira) ne passait pas.
Certains pleuraient, d'autres traînaient des pieds, on
exprimait notre révolte avec nos faibles moyens et nos
petits points animés par une rage naissante mais piquée à
vif.
Passée la maternelle, nous mettons les pieds dans « le monde
des grands » -ainsi que le disaient les profs en nous «
accueillant » en primaire, puis au collège et au lycée-,
avec sa caractéristique principale : le jugement par
notations. Qui n'a pas le souvenir d'un cinglant cinq sur
vingt, agrémenté d'un commentaire non moins cinglant du type
« très insuffisant » ou « devoir plus que médiocre » ?
N'ayant choisi ni l'école, ni les matières enseignées, ni la
méthode d'apprentissage, on nous a habitué à la peur qui
nous prend au ventre à l'idée que nos parents puissent
tomber sur un bulletin de note défavorable. Rappelez-vous
ces fameux bulletins, où notre moyenne apparaissait entre la
plus haute et la plus basse, offrant une comparaison
évidente, dure comme un coup de massue derrière la tête. La
fierté de la « réussite » pour les parents du fiston qui a
fait du zèle, la honte pour ceux du « cancre » en qui ils
avaient placé tant d'espoir. Et le mal-être pour ceux à qui
l'institution fait comprendre qu'ils ne sont « pas assez bon
», étant « en dessous de la moyenne ». Petit à petit, le
système nous fait avaler l'idée de la vertu de la
compétition comme moteur de la réussite sociale, le grand
mythe propagé par toutes les sociétés hiérarchisées. Notre
bulletin de note sert de préface à notre futur bulletin de
paye, les matières que l'on ingurgite de force seront plus
tard le boulot qui nous emmerde.
Nous avons subi la honte de la note en dessous du terrifiant
« dix sur vingt », nous subirons la culpabilisation d'être
le smicard en bas de l'échelle des salaires. Nous n'avons
rien compris à l'utilité des fonctions exponentielles en
mathématiques, nous sommes destiné à l'échec.
Et pour nous persuader que nous ne sommes décidément que des
bons à rien, on nous ressortira à l'occasion l'exemple du «
self-made man » parti de rien et ayant fondé son empire...
L'école est ainsi faite parce que le système a besoin d'une
sorte d'antichambre afin de nous formater l'esprit, de nous
habituer à regarder l'autre non pas comme un camarade, mais
comme le compétiteur présent ou à venir, celui qui sera «
meilleur » ou « moins bon » que nous, en fonction de sa
capacité à s'intégrer dans ce monde de hiérarchie et de
domination.
Parce que cette capacité-là, celle qui fabrique de bons
exploiteurs d'une part et de bons esclaves soumis de
l'autre, est une des clés de voûte de ce système abjecte, il
est important de lui livrer une critique sans merci, en
ayant pour objectif haut et clair, une existence où le mot «
chef » cèdera la place au mot « compagnon ». Un monde où la
solidarité aura botté le cul de la compétition.
Article tiré du n°8 d'ESPOIR, journal du syndicat Interco
Paris Nord de la CNT AIT
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